6 :00 du matin, il fait suffisamment jour pour discerner ce petit troupeau de Bongos glaner les feuilles les plus tendres en bordure de la piste. Il va faire chaud aujourd’hui, la brume est épaisse et nous engloutie par vague successive.
Nous sommes à pied, à moins de 60 mètres de ces grandes antilopes de forêt et en comptons 12, surtout des jeunes et de vieilles femelles aux longues cornes blanchies par les années, un grand mâle repéré plus tôt est toujours quelque part en périphérie de ce petit groupe …
Nous sommes en république du Congo, sur la rive gauche du fleuve du même nom, en face de l’immense RDC.
Je n’aurai jamais pensé y chasser un jour, trop compliqué, et encore moins y organiser des safaris … et pourtant, le projet prend jour, une première saison l’an passé avec peu de chasseurs mais des résultats éloquents. La chasse du Bongo ici est un peu celle du Sitatunga en Ouganda dans le sens ou la densité est telle qu’il n’y a pas une journée sans action. On les chasse à vu, incroyable, sans chiens, pas d’attente en affût, le pistage en forêt n’est pas nécessaire non plus, ils sont partout, aux détours des nombreuses pistes d’exploitation !
13 :00, le ciel s’assombri et l’humidité est à son comble. L’odeur entêtante des moucherons que l’on écrase en les chassant de nos yeux et nos oreilles va bientôt être lavée par l’averse équatoriale que les éclaires annoncent. Joseph, ex-braco et pisteur hors pair, se prépare un petit abris de feuilles en attendant les premières gouttes. Il était déjà pisteur il y a 20 ans sur la même région avant la fermeture, et il a aussi travaillé comme conducteur de machine sur l’exploitation forestière, il connait toutes les pistes principales, secondaires, les bretelles, les salines, les « bailles » (clairières marécageuses) … Le déluge arrive dans un fracas assourdissant, on n’arrive plus à s’entendre dans la voiture alors on ferme les yeux en attendant que ça passe. C’est un rituel depuis 4 jours, il pleut de 13 :00 à 15 :30, scénario idéal pour la chasse du Bongo et du Céphalophe à dos jaune qui aiment tant sortir sur les pistes après la pluie… Ce sont 3 hylochères qui traversent tranquillement devant nous à moins de 20 mètres, le spectacle est assez exceptionnel pour en parler, c’est notre troisième rencontre de visu avec ces gros suidés de forêt, si nombreux sur cette zone. Ils sont protégés au Congo mais nous avons bon espoir d’obtenir un quota dans un an ou deux.
Comme souvent pour la chasse en forêt pluvieuse, nous opérons sur une grande zone de forêt primaire en cour d’exploitation. La cohabitation avec les forestiers fut délicate au départ, mais elle est maintenant solide et bénéfique. Les accès à la forêt au Nord de la rivière Sangha sont barrés et contrôlés par les équipes « d’éco-gardes », et même si le braconnage existe comme partout, il est peu important et encore plus diminué par la présence de nos équipes de chasseurs. L’accès aux concessions de chasse est facile et peu onéreux utilisant les vols réguliers.
Nous avons une équipe d’accueil à Brazzaville, le vol ECAIR en provenance de Paris est en correspondance avec celui d’Air Congo sur Ouesso où nous avons une autre équipe s’occupant des formalités et du transfert en taxi jusqu’à la rivière Sangha. 5 minutes de pirogue et un peu plus de 2 heures de piste pour se rendre au camp où nous arrivons généralement vers 14 :00
Le camp est constitué de chalets en bois tout neuf (en cours de finition) équipés de jolies petites salles d’eau, et d’une partie commune pour les repas surplombée d’un joli bar très aéré. Un barbecue / feu de camp devant la rivière proche complète les installations. L’électricité est fournie par un groupe électrogène.
Ca y est, il neige, on peut y aller annonce Joseph … La « neige » est la petite pluie fine après les averses. Nous décidons de remonter une bretelle et ce sont 3 hylochères qui traversent tranquillement devant nous à moins de 20 mètres, le spectacle est assez exceptionnel pour en parler, c’est notre troisième rencontre inopinée avec ces gros cochons de forêt les deux premières fois en parcourant les pistes en voiture, maintenant à pied sous une pluie fine. Ils sont si nombreux sur cette zone. Aujourd’hui protégés au Congo, nous avons bon espoir d’obtenir un quota dans un an ou deux. Puis c’est un buffle nain que l’on trouve allongé au milieu de la piste, un vieux mâle aux pointes tellement usées qu’il ne lui reste plus que le bandeau ! Mais nous avons déjà un buffle prélevé il y a quelques jours, et c’est le céphalophe à dos jaune qui est à l’ordre du jour. Beaucoup de traces fraîches sur les pistes chaque matin, principalement bongo, buffle, éléphant, céphalophes (dos jaune et Peters), potamochère, gorille et aussi parfois hylochère et léopard.
En temps normal, chacune de ces traces serait une aubaine, une action de chasse en perspective, le point de départ d’une longue marche en forêt avec l’espoir de remonter l’antilope mythique. Mais ici, la densité est telle que nous chassons principalement à vue ou à la billebaude. Le dos jaune sort beaucoup après la pluie et la piste sur laquelle nous marchons est truffée de traces. L’idée est de le croiser sur la piste en marchant lentement sans bruit. Michael, guide Namibien faisant la saison au Congo, reste à la voiture. C’est une grande ligne droite et il nous voit souvent de loin. Nous suivons plusieurs traces sur quelques dizaines de mètres avant de les voir entrer à nouveau dans la forêt. Nous avons dû croiser une vingtaine de traces différentes en 2 heures de marche lorsqu’un céphalophe bleu traverse devant nous à 30 mètres. Pas le temps de tirer, il n’a fait que traverser tranquillement la piste. Je demande à Joseph de l’appeler, technique diablement efficace en forêt sur ces animaux, la carabine de Georges est sur le trépied, nous sommes prêt lorsque la voiture arrive derrière nous. N’ayant pas demander à Michael de nous rejoindre, je devine qu’il à repérer un céphalophe à dos jaune. C’est un grand mâle de dos jaune qui est sorti dans notre dos pendant que nous marchions.
Nous repartons donc sur nos traces, Michael à pris le soin de marquer l’endroit où l’animal est à nouveau entré en forêt. 10 minutes de marche rapide et je repère bientôt le petit bout de papier blanc jetter sur la piste par Michael. On se poste en bordure de chemin sans vraiment nous cacher mais en restant immobile. Georges vérifie la hauteur du trépied où repose sa carabine lorsque notre céphalophe nous sort sous le nez, à moins de 15 mètres, en plein travers.
Identifié, instructions données, j’attend le coup de feu libérateur,
la caméra tourne … rien … il va à nouveau entrer en forêt lorsque le
coup part enfin. Il était trop près et notre chasseur avait du mal à
l’ajuster au grossissement 4 !!
Il est magnifique, un très grand mâle aux cornes de plus de 15 centimètres.
Pays fermé à la chasse depuis plus de 20 ans, la faune est abondante et les animaux peu farouche. Nous pensions utiliser des chiens sur le Bongo comme d’accoutumé dans les pays voisins, et nous en avions même deux que les pygmées gardaient au camp. Seulement voilà, avant même d’avoir testé leurs habilités à mettre le Bongo au ferme, un léopard des environs en avait disposé à d’autres fins … C’est donc contraint et forcé que nous avions commencé la saison sans chiens l’an passé, et tout le monde à eu son bongo dans les 3 premiers jours des safaris, souvent repéré à vue dans une contre-allée en passant en voiture, où en stoppant le véhicule sur des traces très fraîches d’animaux marchant sur la piste. Quelques minutes de marche permettent alors souvent de repérer l’animal glanant quelques feuilles la tête dans les buissons. Nous avons aussi quelques miradors sur les salines et autres clairières marécageuses appelées ici « Bays » par les pygmées.
C’est le deuxième safari au Congo de T.D., chasseur américain. Il revient pour un Sitatunga, un bongo et quelques céphalophes. Il a beaucoup plu et le niveau de l’eau est haut dans toutes les rivières de la région. Le courant est aussi un peu plus fort et l’accès aux rivières de forêt n’en ait que plus délicat. On a installé un flotteur à l’avant de la pirogue pour plus de stabilité, Michael et son chasseur russe Oleg ont testé l’embarcation la vieille avec brio, ils sont revenus avec un magnifique sitatunga prélevé dans une jolie plaine inondée, tiré de la pirogue à un peu plus de 50 mètres. Nous avons également un mirador surplombant une partie de ces rives herbeuses inondées, mais il est temporairement utilisé par une immense colonie de fourmis égoïstes …
Oleg va aussi prélever un joli buffle, un céphalophe à dos jaune et quelques céphalophes de forêt ainsi qu’un gros potamochère.
André le guide de T.D. installe son chasseur du mieux possible, mais notre américain n’a pas trop le pied marin et quelques centaines de mètres vont convaincre l’équipe de faire demi-tour. Le reste de la journée sera passé assis en bordure de cette piste principale, à attendre un éventuel céphalophe à front noir. Nous les voyons souvent traverser la piste proche des ponts construits avec ces énormes troncs d’arbres permettant le passage des camions grumiers. C’est bientôt chose faite, André pointe ces jumelles pour identifier l’animal traversant la piste lorsqu’un Sitatunga passe dans son champ de vision !!! Une belle aubaine que T.D. ne manquera pas de saisir !!
Tielman n’a qu’une semaine à passer au camp, il recherche un bongo et un buffle de forêt. Il sait avoir peu de temps pour pouvoir les prélever à l’arc dans de bonnes conditions, à notre connaissance, personne n’a jamais pu prélever de bongo à l’arc son l’aide de chiens ou de mirador, ce serait une première … Premier jour, il revient au camp bredouille, ils ont vu des bongos mais en ayant déjà prélevé un l’an passé, il à mis la barre un peu plus haute. Le lendemain, il revient avec un superbe buffle tiré à 45 mètres à la carabine, il n’avait pas son arc …
Réveil 4h, départ 5h le lendemain à la recherche du Bongo. Il faut environ 40 minutes de piste pour accéder à l’ancienne exploitation et ces nombreuses pistes, idéal pour la chasse du Bongo. Il a plut la nuit dernière et nous trouvons beaucoup de traces sur la piste principale. On décide de partir à pied en marchant lentement sur la piste. Tielman à son arc et une carabine. Le brouillard se dissipe maintenant permettant de voir un peu plus loin. Un magnifique bongo solitaire se gorge de feuilles humides en bordure d’une piste secondaire. Approche rapide, le grand mâle n’est plus qu’à 80 mètres et notre chasseur décide de l’ajuster avec la .375 H&H Magnum. Il sera foudroyer sur place, il faudra donc revenir une autre fois pour tenter cette première de bongo à l’arc et à l’approche …
Au détour d’une piste, un grand céphalophe de Peters se dérobe sous nos yeux. Nous stoppons immédiatement la voiture avec le mince espoir de voir notre animal revenir au milieu de la piste … peu probable, mais pourquoi pas après tout … On se prépare, attend 10 minutes et le grand céphalophe traverse à nouveau la piste devant nos yeux … Georges ajustera son tir qui va foudroyer l’animal dans ses traces. Encore un joli trophée de la forêt congolaise.
Nous avons 4 concessions en amodiation, d’une superficie immense et inconnue avec exactitude. Disons que certains coins ne seront jamais visités … trop grand, trop sauvage ! L’activité actuelle tourne autour de la chasse avec un total de 20 Bongo en quota, même chose pour le Buffle, Sitatunga et Dos Jaune. Les autres espèces ne sont pas un problème, il y a en effet énormément de céphalophes et potamochères. Il est en projet de développer également un camp de vision pour les gorilles et chimpanzés, très présents dans la forêt. Nous les rencontrerons en effet tous les jours ou presque.
En projet est également d’établir un camp de pêche sur la rivière Sangha. Il existe plusieurs espèces de poissons dont le poisson tigre Goliath, endémique au basin du fleuve Congo, c’est de loin le plus gros de la famille des poissons tigres. Le record est actuellement de plus de 70 kg pour 1m50, et certain dise qu’il puisse attendre jusqu’à 130 kg !!! Nos plus belles prises sont pour le moment de 30kg et plus …
Quelques images supplémentaires